{SÉRIE / Portrait de soi(n)} : Coeur de Lionceau (magnétisme)
- Roxane HERTZOG
- 31 mai
- 2 min de lecture

Dans les prémices de la découverte de mes capacités, je n’osais pas trop expérimenter, notamment dans les soins.
Mon magnétisme m’appelait pourtant : picotements dans les doigts de la main gauche et sur le dessus du crâne, il fallait que je fasse du soin.
Une peur panique me terrassait : faire plus de mal que de bien. Alors j’ai payé une formation pour apaiser mon syndrome de l’imposteur, mais elle était si protocolaire que je n’arrivais pas à laisser la place à mes ressentis, chose qu’évidemment, après coup, j’aurais dû voir venir.
Un tout proche, que je nommerai ici Cœur de Lionceau me fait un jour part de sa difficulté à se départir d’une verrue au doigt avec qui il cohabite depuis une bonne dizaine d’années malgré les assauts de nombreux flacons de vernis corrosifs vendus sans ordonnance et l’intervention de plusieurs dermatologues, sans grand succès.
Je me fais toute petite, espérant courageusement échapper à l’invitation que je sens poindre, car je n’ai pas été jusqu’au protocole « soin des verrues » de ma formation.
« Tiens, et si tu essayais de la faire partir avec ton magnétisme ? »
… Zut ! Cœur de Lionceau a plus confiance en moi que moi-même.
M’imaginant déjà lui faire tomber un ongle, un doigt, que dis-je, le bras entier… ou pire, échouer lamentablement, je décline, proposant de revenir vers lui quand mes compétences en la matière atteindraient un niveau acceptable à mon goût. Autant dire… pas demain la veille.
Il comprend mon refus et n'insiste pas davantage.
L'honneur est sauf !
La nuit venue, plongée dans les bras de Morphée et loin de toutes ces préoccupations égotiques, je rêve. Je vois mon Cœur de Lionceau tendre sa main abimée vers moi. C’est alors que je me saisis d’un coton-tige, le plonge dans une bonbonne d’azote liquide toute fumante et applique son extrémité sur la verrue récalcitrante qui crépite d’agonie au contact du froid brûlant.
Une fois réveillée, je me garde bien évidemment de lui raconter mon aventure dermatologique nocturne, l’oubliant presque sous les vagues du quotidien.
Pourtant quelques jours plus tard, Cœur de Lionceau m’interpelle, circonspect.
« T’as fait quelque chose à ma verrue ? »
Je nie toute intervention, persuadée que ce n’était qu’un rêve, mais curieuse je lui demande pourquoi cette question.
Il me montre sa main. La verrue est noire. Brûlée en profondeur. Elle tombera quelques jours plus tard et n’est jamais revenue.
Cœur de Lionceau était prêt à laisser partir sa verrue et j’étais prête à envoyer la juste intention, une fois ma peur de l’échec endormie.
댓글